
La loi 21
La Déclaration des Nations Unies sur l’élimination de toutes formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, consacre la liberté de pensée, de conscience, de religion et de croyance comme un droit de l’homme. Ces droits sont repris dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Mais, a-t-on le droit de manifester sa religion sans restriction ? Que disent les Nations Unies à ce sujet ?
M. Ahmed Shaheed, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté de religion ou de conviction, est mandaté par le Conseil des droits de l’homme et l’Assemblée générale pour examiner les incidents et les actions qui sont incompatibles avec la Déclaration et les autres normes internationales pertinentes.
En 2019, le Rapporteur spécial de l’ONU, ainsi que Fernand de Varennes, et E. Tendayi Achiume ont rédigé une lettre de préoccupation indiquant que « le projet de loi actuel et ses motifs n’indiquent pas en quoi l’interdiction faite à certains représentants et fonctionnaires de porter des symboles religieux dans l’exercice de leurs fonctions est nécessaire et proportionnée pour protéger la sécurité, l’ordre, la santé public, ou la morale ou les libertés et droits fondamentaux d’autrui ».
Cette lettre fait directement référence à la seule exception à la violation de l’expression religieuse prévue par la Déclaration, à savoir que « la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, ne peut faire l’objet que des seules restrictions qui sont prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection de la sécurité publique, de l’ordre public, de la santé ou de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d’autrui ».
Le rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies à la 37e réunion du Comité des droits de l’homme indique clairement que « l’identité nationale », « l’unité nationale » ou la « culture » ne sont pas des justifications valables pour les restrictions des libertés religieuses. Le même rapport prévient que les États sans affiliation religieuse, bien qu’ils soient bien placés pour protéger les droits de l’homme, y compris la liberté de religion et de croyance, sont de plus en plus confrontés à des risques de discrimination. Plus précisément, « là où existe une pluralité de valeurs sociales, des politiques ignorant les différences peuvent créer de facto une hiérarchie des droits lorsque les lois de caractère général imposent des charges disproportionnées aux minorités religieuses, sauf si des mesures d’aménagement raisonnable sont adoptées ».
Un certain nombre de cas ont déjà été portés devant le Comité des droits de l’homme pour défendre l’application de l’exemption. Le Sri Lanka a refusé l’incorporation d’un ordre catholique au motif qu’elle porterait atteinte aux bouddhistes. La France a soutenu que le port de couvre-chefs constituait une menace pour la sécurité publique, et la Russie a affirmé que la propagation de l’homosexualité constituait une menace morale. Ces trois allégations ont été rejetées par le Comité des droits de l’homme, qui les a jugées comme n’étant ni fondées ni valides.
Le projet de loi 21 répond-il aux normes d’exemption de l’obligation de protéger l’expression de la religion ou des convictions ? Le Rapporteur spécial des Nations Unies pense que non. Nous devrons attendre de voir si le Comité des droits de l’homme est appelé à rendre son jugement.
Jaime Webbe
Présidente et PDG
ACNU
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